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Nostalgie #4

Publié le par danslesyeuxdetanh

 

Acte 7 scène 1 : Je n’aurais jamais pensé qu’il y aurait autant de sapins de noël à Hanoï. Des immenses, des roses, des petits, des blancs. Les sapins côtoient gaiement les autels dédiés aux ancêtres et les marmites d’où s’échappent les vapeurs du Pho. Au fil de nos balades, Tanh essaie de chaparder les paquets déposés aux pieds des sapins qui ornent le devant des hôtels. Les grooms le regardent amusés et le laissent faire. L’effervescence monte et en même temps le temps semble s’être arrêté. Il n’y a pas cette ambiance feutrée de nos maisons à noël recroquevillées sur elles mêmes pour se protéger du froid. Pas de course aux cadeaux pour trouver le jouet qui manque, pas de courses au supermarché pour prévoir le repas du réveillon. Les talons qui claquent sur les pavés rosés ne sont pas les miens.

Acte 7 scène 2 : C’est une vieille maison. Le sol en carreaux de ciment, les bougies allumées aux quatre coins de la pièce, les fauteuils confortables nous promettent une soirée de réveillon mémorable. Nous n’aurions pas dû souper dans cet endroit. Mais comme toujours le hasard fait bien les choses. On nous dit que le repas a été spécialement réalisé en notre honneur par le chef. L’ambiance est gaie. C’est étrange de passer un réveillon de noël si porteur de sens avec des gens que nous ne connaissions pas une semaine plus tôt. Les bulles coulent dans nos verres. Nos sourires s’étalent en extra-large sur nos visages. L’ambiance est feutrée. Autour de nous des couples et des familles réveillonnent en chuchotant. Mes enfants semblent heureux. Je les dévore des yeux. J’aimerais tellement les remercier d’être là pour partager ces instants. Je crois que quand ils ont croisé mon regard ce soir là ils y ont lu ce que mes mots n’avaient pas su leur dire. C’est étrange de s’attabler pour le réveillon à 19 heures. Mais c’est l’heure à laquelle on nous avait demandé d’arriver. Nous avons fait durer l’instant. Les derniers à partir. Il est 22 heures. Deux enfants endormis dans nos bras. Nos fous rires pour trouver deux taxis. Même un seul nous aurait suffi. Notre agacement aussi. De ne pas en trouver.

Acte 8 scène 1 : L’effervescence règne dans les deux chambres voisines. Des allers et retours entre l’une et l’autre. Des valises que l’on traîne plutôt qu’on ne porte. Des rires nerveux et en fond sonore la télé allumée sur la chaine française. Un coup de téléphone. Il nous manque un document pour pouvoir prendre l’avion. Jean ne peut nous l’amener qu’en fin d’après midi…s’il arrive à l’obtenir d’ici là. L’avion est à 23 heures. Nous pensions quitter l’aéroport vers 19 heures, inquiets du trafic qui ne s’arrête jamais. Le silence règne désormais dans la chambre. L’inquiétude s’est installée dans notre ventre. Les traits se sont marqués presque instantanément. Seuls les enfants imperturbables continuent à jouer. Il nous faut sortir pour passer le temps. Et arriver à l’heure où le document devrait arriver. Pratiquement aucune parole ne sera émise lors de notre promenade. Nous laisserons une dernière fois l’urgence de la rue nous envahir, les odeurs nous faire de l’œil et les couleurs nous pénétrer.

Acte 8 scène 2 : Monelle et moi avons saisi nos deux petits par la main. Nous avons pris l’ascenseur. Jean est en bas dans le hall de l’hôtel. Nous le rejoignons. L’ascenseur est le témoin silencieux de notre émoi. Nous ne pouvons retenir des petits cris qui ne veulent rien dire. Nos maris à côté ne disent rien. Ils partent en vitesse acheter une bouteille de vin rouge pour l’offrir à Jean. Devant l’immense sapin revêtu de blanc il nous attend. Dans sa chemisette bleue, le cheveu impeccable sa sacoche à la main. A notre approche il nous tend deux malheureuses feuilles sans lesquelles nous n’aurions pu entrer en France. Remerciements. Sourires. Rires. Je lui demande d’expliquer aux enfants ce qui les attend d’ici une heure ou deux. L’avion qu’ils vont prendre. Leur arrivée en France et la découverte de leur nouvelle vie. Jean s’exécute. Tanh lui répond. Il part alors d’un grand éclat de rire et nous explique qu’il a parfaitement compris ce qui se tramait « bé oui je sais qu’on s’en va, mais quand ? ». Je reste interloquée par cette certitude enfouie dans le petit garçon décidément si sensible. Le calme s’empare de moi pour ne plus me quitter. L’avion peut bien avoir du retard, les nombreuses heures qui nous séparent de l’arrivée à la maison peuvent bien, ou mal se dérouler, je m’en moque. Patrick ne comprend pas ce qui s’est passé pendant son absence. Je crois que quand je lui ai raconté il ne m’a pas vraiment cru. Il a fallu que Monelle le lui raconte aussi.

Acte 9 scène 1 : Il est 7 heures du matin. Je surfe sur le net. Je tombe au hasard sur une photographie. Des souvenirs me remontent devant les yeux en un éclair. Mes doigts se mettent en marche.

Presque 6 mois après la nostalgie a fait son œuvre.

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M
wahou ! j'ai lu d'un trait la série nostalgie ... le coeur serré ..
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C
Merci encore une fois de partager ces moments. Bises
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